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N° 58juillet 2015Le Chercheur d’OrSupplément à la« Nouvelle Abeille de Saint-Junien »n° 1230 du 11 juillet 2015. Ne peut être vendu séparément.Il y a 100 ans, Laurent Lachaise, militaire – mareyeurDepuis 1911, Laurent Lachaise tient avec son épouse Marie un commerce de poissons et de primeurs rue Saler (rue Jean-Jacques-Rousseau) et aussi un banc sous les halles. Il est mobilisé en février 1915, mais trop âgé – il a 44 ans – il ne va pas au front et reste cantonné avec le 7e régiment territorial à la caserne Bruix, à Boulogne-sur-Mer.A Saint-Junien, sa femme continue tant bien que mal le commerce. Son approvisionnement arrive en majorité de La Rochelle et de la côte atlantique. Mais dans ces temps difficiles, le poisson et les coquillages se font rares : les pêcheurs et les commanditaires sont partis à la guerre, les trains sont réquisitionnés pour l’armée et quand la marchandise arrive à la gare de Saint-Junien, elle est souvent de mauvaise qualité.Cette femme a une idée lumineuse ! Elle demande à son mari « d’aller faire un tour sur les quais du port de Boulogne, pour voir comment s’organise le marché du poisson, et de se renseigner sur la circulation des trains ». Laurent semble être libre une grande partie de ses journées et il flâne donc sur les quais. Dans ce grand port, les poissons arrivent journellement. C’est décidé : il tente un premier achat de harengs : gagné ! Le poisson arrive à Saint-Junien le lendemain. Désormais Laurent s’organise, il trouve de la marchandise de bonne qualité et en quantité pour faire des expéditions régulières. Plus besoin de mandataire, le poisson est choisi, payé et part aussitôt. Ainsi maquereaux, harengs et autres poissons frais sont en vente sous les halles à Saint-Junien. Le commerce repart, mais nourrit aussi la jalousie des autres mareyeurs qui manquent de marchandises.La guerre continue et le trafic ferroviaire ne garde pas sa ponctualité. Les arrivages se font avec du retard, notre poissonnière descend plusieurs fois par jour à la gare, pour bien des fois ne rien recevoir. Malgré cela, le commerce continue jusqu’à la fin de hostilités. Jean-René Pascaud> Marie et Laurent Lachaise sous les halles, entourés de clients. Coll. privée.
Le Chercheur d’Or2 Le chercheur d’Or • N° 58 • juillet 2015Le coup passa si près…Jean Princeau, soldat du 73e Régiment d’infanterie est né à Saint-Junien le 18 janvier 1893. Mégissierde son état, il officiera accessoirement dans les tranchées comme coiffeur, état dont il conservera en souvenir tondeuse et ciseaux.Ce jour du 26 septembre 1916, lors de la prise de Combles (bataille de la Somme), aux confins de la Somme et du Pas-de-Calais, quasiment à l’endroit même où de nombreux Saint-Juniauds perdirent la vie au Transloy deux ans plus tôt, peut-être a-t-il pensé à Victor Hugo et à son poème Après la bataille si, comme d’autres enfants de Saint-Junien, il l’avait appris à l’école communale. Avisant un blessé allemand après l’assaut, Jean Princeau se penche vers lui pour lui passer sa gourde, « un gradé » se souvient-il alors en contant son histoire à sa famille ; ce dernier, officier ou sous-officier irascible, ne supportant probablement pas le fait d’être secouru par un ennemi, qui plus est simple soldat, tire son pistolet et le vise à la tête Le soldat Princeau évite le coup fatal, mais laisse dans l’aventure un bout de son nez…« On ne peut pas se fier à un Allemand : on lui donne à boire, il vous tire dessus… », dira-t-il plus tard.L’histoire ne dit pas ce qu’il est advenu de l’Allemand, ni si on lui a donné à boire « tout de même ». Quant à Jean Princeau, il est revenu de la guerre, avec diverses blessures par balle ou éclats d’obus qui lui ont valu plusieurs séjours de convalescence, dont celui de cette carte-photo, prise peu de temps avant cette aventure. David ChaputAprès la batailleMon père, ce héros au sourire si doux,Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tousPour sa grande bravoure et pour sa haute taille,Parcourait à cheval, le soir d’une bataille,Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit.Il lui sembla dans l’ombre entendre un faible bruit.C’était un espagnol de l’armée en dérouteQui se traînait sanglant sur le bord de la route,Râlant, brisé, livide, et mort plus qu’à moitié.Et qui disait : « A boire ! À boire par pitié ! »Mon père, ému, tendit à son housard fidèleUne gourde de rhum qui pendait à sa selle,Et dit : « Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé.»Tout à coup, au moment où le housard baisséSe penchait vers lui, l’homme, une espèce de maure,Saisit un pistolet qu’il étreignait encore,Et vise au front mon père en criant : « Caramba ! »Le coup passa si près que le chapeau tombaEt que le cheval fit un écart en arrière.« Donne-lui tout de même à boire », dit mon père.Victor Hugo> Jean Princeau, à gauche de l’infirmière. Carte-photo, collection privée.
N°58Le chercheur d’Or • N° 58 • juillet 2015 3un sceau de la ville Saint-JunienPapetiers de saint-junien en 1900Le Chercheur d’Or a déjà publié une belle photographie d’ouvriers saint-juniauds du début du XXe siècle (les mégissiers de l’usine Dumas & Raymond en 1900, dans Le Chercheur d’Or n°51 de septembre 2013).Cette fois-ci, ce sont les papetiers du Moulin-Pelgros que nous découvrons sur un cliché inédit que nous devons à une de nos lectrices.Avec 6 gamins, 12 femmes (leur tâche était de trier et emballer les feuilles de papier) et 56 hommes, c’est l’effectif quasi-complet de la papeterie qui pose avec gravité devant l’objectif. Mais le plus étonnant est peut-être de trouver, au milieu des ouvriers, un des propriétaires de l’entreprise. En effet, le personnage au centre du second rang, en costume gris et casquette, n’est autre que Pierre Codet, co-héritier de la papeterie fondée en 1865 par son père et son oncle, Camille et Louis Codet. Il est vrai qu’il est aussi maire de Saint-Junien (1895-1904), et qu’il s’agit peut-être pour lui de s’afficher au milieu de ses électeurs.Frank Bernardin memoriam,les religieuses du Verbe-IncarnéParmi les tombes abandonnées du cimetière de Saint-Junien, peut-être avez-vous remarqué un enclos en fer forgé, couleur de rouille, renfermant cinq sépultures aux croix de fonte chancelantes ou brisées.c’est la dernière demeure de quelques-unes des religieuses du Verbe-Incarné qui ont oeuvré dans notre ville de 1834 à 1904.Leur couvent de Saint-Junien fut fondé par Etienne Denis (1761-1856), curé d’Azerables en Creuse et restaurateur de l’ordre en 1817. Les soeurs y ont vécu cloitrées, se consacrant principalement à l’enseignement des petites filles et au service des pauvres. Durant 70 ans elles ont tenu école à Saint-Junien, jusqu’à la loi du 7 juillet 1904 qui interdit l’enseignement aux congrégations religieuses. Le couvent est alors fermé et les bâtiments rachetés par la commune en 1905. Les soeurs se dispersent, certaines trouvant asile quelque temps dans des familles de Saint-Junien (chez madame Vignerie, par exemple), les plus âgées à l’hôpital-hospice rue Defaye. La dernière à être inhumée à Saint-Junien est Anne-Marie Gonne, décédée en 1940 à l’âge de 96 ans.La concession du cimetière, dernier témoignage des bonnes sœurs du Verbe-Incarné, ne mériterait-elle pas d’être préservée et restaurée?Frank Bernard> Ouvriers et ouvrières de la papeterie du Moulin-Pelgros, à Saint-Junien, vers 1900.Collection privée.> La concession du Verbe-Incarné au cimetière de Saint-Junien.
Publication de la Société des Vieilles PierresPour la promotion du patrimoine du pays de Saint-JunienSociété des Vieilles PierresRédaction :Frank BERnARDn°ISSn 2117-8879• Imprimerie L’ABEILLE.Le Chercheur d’OrLe Chercheur d’Orest consultable en ligne à l’adresse : http://gantier.jimdo.com/La version papier est disponible gratuitement aux archives municipales, à la médiathèque de Saint-Junien et à l’office du tourisme.Pour tout renseignement : Tél. 05 55 02 30 69 – Courriel : socvp@orange.frON ignore jusqu’à quelle date les consuls ont utilisé un tel emblème. Il n’est sans doute plus en usage depuis longtemps quand la ville fait enregistrer ses armoiries en exécution de l’édit royal de 1696, qui l’y oblige. Leur lecture héraldique est : d’azur à un lion d’or couronné et lampassé de gueules. En simplifiant, disons que sur un fond bleu se détache un lion jaune dont la langue et la couronne qu’il porte sont rouges.Le lion a été rapproché de celui du contre-sceau de la cité de Limoges, placée, comme Saint-Junien, sous l’autorité de l’évêque du diocèse. Toujours en cette fin du XVIIesiècle, le chapitre des chanoines de Saint-Junien déclare un blason d’azur à trois lions de sinople [verts] couronnés, lampassés et armés d’azur à un lion d’or…Un précédent article a évoqué le sceau de la ville de Saint-Junien, attribuable au XIIIe siècle. Il s’agissait d’un sceau pendant, à double empreinte, avec son contre-sceau, fixé sur une languette de parchemin ou sur des fils de soie.de gueules. Là encore, se manifeste la référence à l’évêque de Limoges.Parmi les quadrupèdes, le lion est le plus fréquent dans les armoiries, symbole de force et de courage, animal noble par excellence. Il est représenté dressé, corps et tête de profil, la langue tirée; sa queue repliée le long du dos se termine par un crochet en dedans. A Saint-Junien, le panache se tourne vers l’extérieur, ce qui est plutôt le signe distinctif du léopard.Malgré cela, c’est une image familière aux habitants. Mise au goût du jour, ils la reprennent en 1790 dans un sceau ovale de 24 mm de hauteur. La légende est devenue MUnICIPALITé DE ST-JUnIEn LA LOI LE ROI. En 1792, ce dernier mot disparaît. La Révolution suscite une chasse effrénée aux armoiries. Un arbre de la liberté, surmonté d’un bonnet phrygien remplace alors le lion, sans changement de légende. Ce nouveau sceau s’apparente à celui, contemporain, du district de Saint-Junien. Tous deux sont des empreintes de cire plaquées directement sur le support.Au XIXe siècle, la ville de Saint-Junien s’aligne sur les régimes politiques successifs du pays : aigle sous l’empire, fleurs de lys sous la monarchie. Après 1870, avec la IIIe République, le vieux lion reprend place au fronton des édifices et monuments publics, sur les cachets et les entêtes. Sur le papier, il est parfois concurrencé par des tampons à l’effigie de la République assise, radiée et tenant un faisceau de licteur.Une flamme postale des années 1990 associe le vieux lion et le logo de la commune. C’est l’époque où des villes oublieuses du passé, voulant s’en démarquer, renient les armoiries anciennes pour leur substituer des logos, le plus souvent d’une banalité affligeante.Pierre Eberhart> Sceau de la municipalité de Saint-Junien, époque révolutionnaire. Archives de la Haute-Vienne.> Détail de la stèle du jumelage, square de Jumet.