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N° 68janvier 2018Le Chercheur d’OrSUPPLÉMENT À« La Nouvelle Abeille de Saint-Junien »n°1344 du jeudi 4 janvier 2018. Ne peut être vendu séparément.L’hommage d’un pénitentà saint Jérôme La chapelle du cimetière renferme bien des trésors. Parmi ceux-ci, un curieux tableau représentant saint Jérôme. Détail du tableau : procession de pénitents autour dela chapelle. Publication de la Société des Vieilles Pierres pour la promotion du patrimoine du pays de Saint-JunienC’EST une huile sur toile de 86,3 cm x 76 cm, probablement de la première moitié du XIXe siècle. Sans date et sans signature, on peut cependant supposer qu’il s’agit là d’une œuvre d’un membre de la confrérie des Pénitents bleus. En effet, si la chapelle originelle dédiée à sainte Madeleine date du XIIIe siècle, elle devint au début du XVIIe siècle le siège de la confrérie des Pénitents bleus de Saint-Junien. En 1640, les pénitents obtinrent l’autorisation d’agrandir la chapelle médiévale à l’ouest et la dotèrent d’une tribune pour accueillir les réunions de leur assemblée. Si la confrérie a disparu dans la deuxième moitié du XIXe siècle, elle nous a légué un mobilier rappelant son activité en ces lieux. Parmi les souvenirs se trouve cette toile figurant saint Jérôme. De facture naïve, voire grossière, elle témoigne de la ferveur de certains pénitents qui faisaient des offrandes à leur saint patron. Saint Jérôme est ici campé dans la même posture que la statue centrale du retable le représentant. On peut imaginer que l’auteur de ce tableau n’a eu qu’à poser son chevalet face au retable pour exécuter son œuvre. Un autre détail qui atteste du caractère local de cette peinture est la représentation d’une procession de pénitents en grands habits, flambeaux en mains autour d’une chapelle qui pourrait être celle de Saint-Junien. Une étude récente de ce tableau commandée par la Municipalité a fait apparaître que l’œuvre actuellement visible recouvre une œuvre plus ancienne, probablement une Vierge à l’Enfant du XVIIIe siècle. L’étude révèle que le traitement pictural de cette œuvre, qui est masquée par la peinture représentant saint Jérôme, présente des qualités esthétiques bien supérieures à l’œuvre actuellement visible. Faut-il, cependant, la rétablir dans son intégrité ? A l’évidence non, car si la qualité de la Vierge à l’Enfant est indéniable, ce type de sujet n’est pas rare et n’apporte rien à l’histoire locale. Au contraire, la représentation de saint Jérôme, bien que naïve, est un authentique et rare témoignage de l’occupation de cette chapelle par la confrérie des Pénitents bleus. Pour l’histoire locale, cette peinture est donc importante et doit être regardée comme un ex-voto humblement offert à la chapelle par dévotion à saint Jérôme, le saint patron des Pénitents bleus. Thierry Granet Saint Jérôme, huile sur toile, chapelle du cimetière.Détail du tableau du XVIIIe siècle apparaissant dans une« fenêtre » aménagée sur la toile.
Le Chercheur d’Or2 LE CHERCHEUR D’OR • N° 68 Ijanvier 2018La Giboire, années 50 :une enfance coopérative…De juillet à septembre, la colonie de vacances de L’Union Syndicale Ouvrière, La Giboire, accueillait garçons et filles de la ville, en deux séjours d’une durée d’un mois chacun. Les demandes des familles étaient nombreuses. LA répartition se faisait en fonction de l’importance des achats des parents, inscrits sur le carnet coopérateur, dans les différents magasins de la « Coopé », de la situation de famille et l’âge des enfants de moins de 15 ans. Les séjours étaient mixtes, d’une mixité contrôlée : un séjour garçons et un petit contingent de fillettes de moins de 13 ans, un séjour de filles et petits garçons, séjours en alternance de date d’une année sur l’autre. La Giboire accueillait aussi des garçons et filles venus de la banlieue rouge parisienne.Le départ du premier séjour avait lieu place Joseph-Lasvergnas, devant le siège de l’U.S.O., à une date fixée entre le 8 et le 11 juillet. Parents et enfants étaient convoqués à 4 heures 30 le matin. Les trois cars Châtenet étaient déjà là, ainsi que quelques moniteurs et monitrices. Les chauf-feurs chargeaient les mallettes (on ne disait pas valises) sur les toits, dûment étiquetées et solidement fixées. Les anciens cherchaient leurs camarades, quelques pleurs chez les nouveaux, larme furtive au coin de l’œil d’une maman… Départ à 5 heures. Le calme régnait dans les cars pour cause de somnolence. Toutes les précautions étaient prises avec la distribution de sacs en papier pour les estomacs sensibles. Arrêt à Saintes pour se restaurer et plus. (Anecdote : en guise de casse-croûte, une maman avait donné à son gamin… un lapin farci ; n’ayant pu manger toute la bête, il en avait gardé les restes pour le retour. Les effluves qui émanaient de sa valise ont alerté ses camarades de dortoir…). Marennes, Le Chapus, le bac, l’île d’Oléron… la Giboire enfin, où nous accueillait la directrice, Madame Chaussat. Les équipes constituées s’installaient dans leurs dortoirs ou dans les grandes tentes marabout, dressées dans le grand pré qui jouxtait la colonie. L’après-midi était consacrée au repos et au repérage des environs. Les activités commençaient le lendemain avec un emploi du temps quotidien quasi immuable : lever, toilette, dérouillage (on ne disait pas jogging) vite abandonné car il n’amusait personne, petit déjeuner. Puis la mer et la plage et selon l’heure des marées, promenades sur les rochers et baignade. Déjeuner, sieste obligatoire, plage et baignade, promenade dans les petits bois de pins et le bois de La Martière. Retour à la colonie :temps libre ou jeux, ping-pong, volley, lecture ou papotages. Dîner. Toilette. Coucher et extinction des feux… Le jeudi, jour de repos des personnels de cuisine, pique-nique avec de solides sandwichs à base de sardines, jambon et vache-qui-rit… Des soirées récréatives, animées par de jeunes talents, se déroulaient dans le réfectoire transformé en salle de spectacle : gros succès des B…’s sisters interprétant « Les trappeurs de l’Alaska ». Les matchs de ballon-prisonnier suscitaient les passions quand nos rivales n’étaient autres que les Limougeaudes de la colonie d’en face, La Boulinière. La préparation de la fête des parents absorbait une grande partie de notre temps et leur accueil était un grand moment de plaisir partagé ! Les garçons ayant campé quelques jours près de la plage de Chaucre, nous avions, nous les grandes filles, demandé et obtenu le même privilège. C’était sans risque : Jean-Louis Chaussat nous apportait le courrier et les repas chaque jour. Trois jours de semi-liberté sur une plage quasi déserte, nonobstant la présence de jeunes femmes aux seins nus (quelle audace en 1953 !) qui avaient fortement émoustillé les garçons du séjour d’avant… Nous chantions beaucoup à la Giboire, en chœur et avec convic-tion, en canon, à plusieurs voix, chants de circonstance pour tous les moments et les activités de la journée. Nous chantions le joli matin plein de lumière, le vent frais du matin ; pas de jambe de bois dans la troupe des joyeux corsaires. Combien de jambons de Mayence engloutis, combien de remerciements à Madame Veyrié, notre cuisinière !Le port s’endort, pas de coucher sans berceuse, dont la complainte pathétique du crapaud haï par les hommes ! Enfants de la guerre et de l’après-guerre, nous chantions la paix, l’amitié, la liberté, la confiance en l’avenir… et sur les petites routes de l’île, au pas cadencé, notre chant identitaire, l’hymne de La Giboire à la gloire de notre coopérative. Le jour du départ arrivait, précédé par une visite à Saint-Pierre pour acheter des souvenirs et un circuit en car dans l’île, de La Côtinière au phare de Chassiron. Ceux ou La Giboire, août 1953, séjour filles, collection A. Bigaud.
N°68LE CHERCHEUR D’OR • N° 68 I janvier 2018 3Sur la brêchecelles du premier séjour croisaient ceux et celles du second séjour : qu’ils ou elles étaient pâlot(e)s ! En septembre, La Giboire s’endormait alors pour trois saisons. Retour en chansons pour Saint-Junien, notre point de départ. L’arrivée, les adieux aux vacances et à l’été : ce n’est qu’un au-revoir… L’U.S.O. a été recyclée, La Giboire a brûlé et tombe en ruines, mais son souve-nir est ancré dans la mémoire collective. Elle a permis à des générations d’enfants de milieu modeste de découvrir la mer, de jouir de vraies vacances, et venant des différents quartiers de la ville, de mieux se connaître. N’a-t-elle pas, ainsi, contribué à conforter l’âme saint-juniaude faite de solidarité et de partage ? Annette BIGAUD (Séjours 1951,52,53). Hymne de La GiboireA notre époque, les fouilles de la place de la République à Limoges, sur l’empla-cement de l’abbaye Saint-Martial, ont livré des sarcophages méro-vingiens en impactite. Les recherches de MmeRaynaud portent sur ce type de sarcophages et sur le remploi de leurs fragments dans des maçonneries, remploi constaté dans un large espace géographique. Restons simplement à Saint-Junien, où une telle réutilisation est visible à l’extérieur du croisillon nord de la collégiale et sur la façade de la chapelle du cimetière. Si les fouilles récentes au chevet de l’église ont fourni de nombreuses sépultures, un seul sarcophage a été rencontré, en granit, et brisé. Les autres inhumations, le plus souvent en coffres avec pierres posées de chant, n’incluaient aucun élément d’impactite. Cependant, la présence de cette roche a été remarquée en 1924 lors de la reconstruction du clocher central, après son écrou-lement deux ans auparavant. C’est Léon Rigaud qui en a gardé le sou-venir dans ses notes si précieuses conservées aux Archives départe-mentales de la Haute-Vienne. Le scrupuleux Léon Rigaud consigne donc la présence d’une sorte d’aggloméré violacé, très foncé, d’une espèce inconnue, s’égrenant et semblant être de la pierre volcanique, comme il s’en trouve d’ailleurs sur les LE 24 mars dernier, invitée par IMPACT, Mme Nicole Raynaud nous a entretenus des sarco-phages en pierre de Chassenon, sujet passionnant qui concerne les productions tirées de l’impactite, roche résultant de la chute de la fameuse météorite dans la région de Rochechouart, il y a environ 200 millions d’années. Longtemps ignorée, cette roche a été signalée au début du XIXe siècle par le porcelainier et minéralogiste limougeaud François II Alluaud (1778 – 1866). Dans sa Statistique de la Haute-Vienne (1808), le préfet Louis Texier-Olivier indique : la découverte de cette brêche est nouvelle… les uns l’ont prise pour un ciment artificiel, les autres pour un produit volcanique. François Alluaud précise que la brêche se compose de gros fragments de gneiss, dont le mica semble avoir été rougi par une sorte de calcination… la roche se colorant sous diverses nuances, violette, verdâtre, grisâtre.Et il ajoute : la brêche porphyrique de Chassenon a de la consistance et assez de cohésion pour se laisser travailler avec facilité. Au Moyen Age, on en taillait des cercueils, des sarcophages que le peu de pesanteur de la roche permettait d’envoyer à de grandes distances. La porosité à laquelle elle devait la propriété d’absorber les gaz et les liquides qui provenaient de la décomposition des cadavres, en assurait une conservation séculaire, tandis que les corps placés dans les sarcophages en granite de la même époque étaient complètement réduits en poussière.murs de l’église quelques échantillons, et aussi de disséminés dans les piliers effondrés et dans leurs fondations. On trouve également quelques-unes de ces pierres dans les voûtes du vieux pont Saint-Martial, actuellement en réparation, à Limoges. Rien d’étonnant si Léon Rigaud hésite dans une identification, aboutie seulement il y a un demi-siècle. Depuis, l’Astroblème de Rochechouart est là pour apporter les connaissances nécessaires. Existe-t-il d’autres traces d’utilisation d’impactite à Saint-Junien ? C’est possible, et les recherches sont à faire. Inutile de les commencer par la rue de la Brêche, qui relie le boulevard de la République à la rue Louis-Codet. Il s’agit simplement d’un passage ouvert dans les anciennes fortifications, dont la tour de Vengeance, voisine, est un vestige. Pierre Eberhart En gris foncé, blocs d’impactite visiblesà l’extérieur du croisillon nord de la collégiale. RefrainDe bon matin (bis) Sous les grands pins (bis) Sur le bord de la mer immense Nous défilons (bis) Gais bataillons (bis) Du Limousin, joyeuse enfance. Le beau ciel pur (bis) Les flots d’azur (bis) Rendent nos forces plus actives Et plein d’ardeur (bis) Chantons en chœur (bis) Vive notre Coopérative ! CoupletEnfance coopérative Par toi, nous sommes gais lurons. Pour nous, plus de mines chétives, Sous l’ardent soleil d’Oléron. Car tout près des forêts ombreuses, Naquit le nid de nos plaisirs. Oui, c’est une Giboire heureuse, Que l’U.S.O. a fait surgir !
LE CHERCHEUR D’ORPublication de la Société des Vieilles PierresPour la promotion du patrimoine du pays de Saint-JunienSociété des Vieilles Pierres : 18, rue Paul-Elluard • 87200 SAINT JUNIENLe supplément « Le Chercheur d’Or » est consultable en ligne à l’adresse : www.gantier.jimdo.comLa version papier est disponible gratuitement aux archives municipales, à la médiathèque de Saint-Junien et à l’office du tourisme.N°ISSN 2117-8879 Pour tout renseignement : 05 55 02 30 69 – Courriel : socvp@orange.frEDITIONS L’ABEILLE B.I.P. SASDépôt légal à parution • ISSN 3441-4101 K • ARRONDISSEMENT DE ROCHECHOUART. Autorisé pour l’arrondissement judiciaire à publier les annonces judiciaires et légales en matière de procédure civile et de commerce, ainsi que les actes des sociétés. No CPPAP 0615 I 87943 • Tirage : 4.000 ex. Abonnement 2017 : 45 € • Prix du No 1,20 €Directeur de Publication :François BUSSAC • Rédactrice en chef : Louise CARPENTIER • Rédaction « Le Chercheur d’Or » : Franck Bernard et Société des Vieilles Pierres.Conception graphique : Studio four cat’S : Sébastien CATILLON. Impression : SAXOPRINT.Raymond Las Vergnas.DES SAINT-JUNIAUDS MÉCONNUSRaymond Las Vergnas(1902-1994)ICI, dans notre Limousin, et encore plus à Saint-Junien, le patronyme Lasvergnas est connu et porté par un grand nombre de familles. Alors, quand on découvre un auteur né à Saint-Junien qui écrit son nom Las Vergnas, on s’interroge ! La preuve en est : après un passage par les archives municipales et une consultation de l’état civil, nous ne nous sommes pas trompés, il est né Lasvergnas. Las Vergnas est une forme ancienne de l’écriture de son patronyme, voulant dire en patois de chez nous, les vergnes, c’est-à-dire les aulnes. Il a retrouvé les racines de son nom, peut-être pour garder son origine limousine. Mais alors, qui estLouis-Georges-Raymond Las Vergnas ? Il est né à Saint-Junien le 9 décembre 1902 du côté du faubourg Notre-Dame, fils de Emile Lasvergnas, gantier et de Marie-Justine Failly-Lalande, sans profes-sion. En 1938, le 27 décembre, il épouse Anne-Marie Suzanne Luc, femme de lettres connue sous son nom de plume Anne-Marie Soulac. ll meurt à Paris, le 25 mars 1994. Après son baccalauréat ès lettres obtenu en 1920, il décroche à la Sorbonne une licence de lettres en 1921, un diplôme d’anglais en 1923, une agrégation d’anglais en 1926 (il est 1er) et enfin son doctorat en 1932. En 1936, pendant le Front Populaire, il est le chef de cabinet du ministre de l’Education Nationale et des Beaux-Arts, Jean Zay. Durant la guerre de 39-45, il sera prisonnier pendant trois ans. Son parcours professionnel est des plus prestigieux : (nous ne le mentionnons que partiellement).• Professeur au Lycée Janson de Sailly.• Détaché à l’Université de Buffalo (Etats-Unis) en 1938 et 1939. • Titulaire de la chaire de littérature et de civilisation moderne de la Grande-Bretagne en 1945. • Assesseur du doyen en Sorbonne, 1967 et 1968. • Doyen de la faculté des lettres de Paris en 1968. • Président de l’Université de Paris III de 1971 à 1975, année où il prendra sa retraite. Il commet de nombreux livres, essais et autres romans, et il serait trop long de les citer tous ici. En voici quelques titres : • F.D. Rooseveltou la Dictature de la Liberté, • La flèche d’Iolas, • Le bal continu, • Heure exquise,qui sera en compétition pourle prix Goncourt en 1954(attribué à Simone de Beauvoir pour Les Mandarins), • Les yeux de la Sicile, • Les sabots de Nuremberg. En 1961, il reçoit le Grand Prix de Littérature de l’Association des Gens de lettres pour l’ensemble de son œuvre. Il traduit aussi de nombreux romans de l’anglais. Il collabore à des travaux sur la littérature anglaise et américaine. Je vous invite à aller à la média-thèque de Saint-Junien pour y découvrir quelques-uns de ses ouvrages, qui sont en rayon ou en consultation. Jean-René Pascaud 3Couverture d’un ouvragede Raymond Las Vergnas paru en 1944.