N° 59octobre 2015Le Chercheur d’OrSupplément à « La Nouvelle Abeille de Saint-Junien »n° 1237 du 3 octobre 2015. Ne peut être vendu séparément.Les Vincent,trois générations au service de la musiqueLes anciens Saint-Juniauds se souviennent certainement d’avoir poussé la porte d’un magasin d’articles pour ganterie situé au 12 de la rue Gabriel-Péri (anciennement rue de la Liberté) et tenu jusqu’au début des années 60 par Roger Vincent. La maison Vincent qui fournissait en fil et aiguilles les nombreuses fabriques de gants de la ville, ainsi que les piqueuses à domicile, était ancienne et réputée ; depuis sa fondation dans les années 1880, trois générations s’étaient succédé à sa tête : François Vincent-Lapierre, le fondateur, Fernand Vincent son fils cadet et enfin Roger Vincent, le petit-fils né en 1895.Mais plus encore que la ganterie, c’est la musique qui fut la passion de cette famille. François Vincent (1836-1895), le grand-père, est secrétaire de la société philharmonique Les Enfants de Saint-Junien, à partir de 1872 et jusqu’à la fin des années 1880. Son fils Fernand (1870-1954) prend la relève en exerçant la fonction de secrétaire de L’Avenir musical de 1905 à 1925. Mais c’est le fils aîné, Joseph (1865-1948), qui est le plus investi dans la musique. Tout jeune, il se fait remarquer dans les concerts de la philharmonique où il chante de petites scènes comiques et des airs d’opérette ; en juin 1887, par exemple, « L’Abeille » de Saint-Junien rapporte : « Notre sympathique compatriote, Joseph Vincent, a chanté avec son brio comique le plus séduisant la grande scène de Lhuillier Né pour être avocat. Les paroles de cette charge et le talent si spécial de notre jeune amateur ont véritablement désopilé la salle ». Joseph Vincent pratique aussi divers instruments (violoncelle, accordéon) et surtout il compose de multiples pièces musicales, souvent des chansons, dont certaines comme Lettre à la Glane ou La marche des gantiers lui sont inspirées par Saint-Junien. Ses partitions sont vendues dans le magasin de la rue de la Liberté tandis que « L’Abeille »publie le texte de certaines de ses pièces chantées (saynètes, pochades).Quant au troisième fils de François, Emmanuel Vincent, il a épousé Rose de Bertrand, professeur de piano et de chant, qui se produit plusieurs fois en concert à Saint-Junien avant 1914.C’est donc tout naturellement que Roger Vincent, fils de Fernand, se dirige très jeune vers la pratique du piano. Avant 1914, il adapte des airs célèbres pour la musique d’une « revue locale » satyrique intitulée Saint-Junien en Chine. Blessé sérieusement à la main droite en 1916 dans la Somme, il continue cependant à jouer après la guerre, lors de la projection de films muets au cinéma L’Avenir, au cours de nombreuses fêtes (inauguration du musée Jean-Teilliet en 1931) et cérémonies religieuses. Enfin, comme son père, il assure durant plus de 20 ans le secrétariat de L’Avenir musical dont il est la cheville ouvrière.De 1875 à 1914, la musique est au premier rang des distractions à Saint-Junien où les sociétés musicales (La Philharmonique,L’Avenir, L’Espérance) rivalisent d’ardeur lors de multiples concerts sous le kiosque de la place Lacôte ou au champ de foire. Durant trois générations, les Vincent en ont été parmi les grands animateurs. Frank Bernard> Joseph Vincent, vers 1935, en compagnie de ses petites-nièces; à droite, Marie, son élève au violoncelle, à gauche, Alice, élève de la cantatrice Rosa Heilbronner. (Collection particulière).

Le Chercheur d’Or2 Le chercheur d’Or • N° 59 • septembre 2015plaques commémorativesde la collégiale de saint-JunienQui sont-ils, que sait-on d’eux ? 7. Raymond, l’un des 4 frères Janicot.François Aimé Raymond Janicot, 229e de la liste, est né à Saint-Junien boulevard Gambetta le 4 septembre 1889, fils de François Janicot clerc de notaire et de Marie-Elise Buély, mariés à Saint-Junienle 8 octobre 1888. Ils sont 4 fils issus de cette famille : son frère jumeau né le 3 septembre 1889porte le nom de Maurice ; les deux autres frères, nés boulevard Garibaldi, sont Alphonse né le 7 avril 1892 et Marcel-Pierre Léon né le 27 novembre 1898. Raymond, jeune appelé de la classe 1909, peut bénéficier d’un sursis pendant que son frère Maurice est sous les drapeaux. Il renonce volontairement au bénéfice de ce sursis le 8 juillet 1911 et est affecté au 50e RI le mois suivant. Il passe caporal le 11 mai 1912. Il obtient peu après le titre d’élève-officier et suit les cours spéciaux du 1er octobre 1912 au 31 mars 1913. Il est alors nommé sous-lieutenant au 63e RI. Il rentre dans ses foyers le 26 septembre 1913. Rappelé le 1er août 1914, il est affecté comme sous-lieutenant mitrailleur au 263e RI. Le 17 septembre à Puiseux, dans les tranchées, sous un violent feu d’artillerie et de mousqueterie, il est blessé au bras gauche par des schrapnells. Le 5 octobre, il est proposé pour une citation à l’ordre de l’armée par son chef de corps. Elle porte le n° 166 du 26 octobre 1914 et est ainsi rédigée : « Commandant d’une section de mitrailleurs et officier mitrailleur remarquable a fait preuve au combat de Rocquigny le 28 août 1914 d’un courage digne de tout éloge et de qualités militaires très brillantes. A au combat de Puiseux le 17 septembre brisé à plusieurs reprises l’étau des attaques allemandes menées par un ennemi très nombreux et a eu le bras fracturé par un éclat d’obus ». Il est promu lieutenant de réserve le 23 juillet 1915. Le 15 juin 1916, le 263e RI est dissout et le 1er bataillon comportant la 2e compagnie de mitrailleurs de Janicot est intégré au 338e RI. Il prend la tête de la compagnie de mitrailleurs n° 4. Il retrouve dans ce régiment son frère jumeau Maurice qui est sous lieutenant de réserve dans la 20e compagnie du 5e bataillon. Il est nommé capitaine le 27 janvier 1917. C’est au Chemin des Dames, près du Moulin de Laffaux qu’il va encore se distinguer. Il est cité à l’ordre général n° 182 du 20 mai 1917 : « Jeune capitaine mitrailleur a su au cours de l’attaque du 16 mai 1917 diriger une action de ses sections en parfaite liaison avec l’infanterie en se multipliant, se montrant sur les emplacements de tir, électrisant ses gradés et ses hommes par son exemple, son courage et son mépris du danger ». Il est de nouveau blessé le 26 mars 1918 par balle, à la poitrine et au bras gauche, dans le secteur de Beaulieu et Ecuvilly. Cela vaudra encore à Raymond Janicot une citation à l’ordre de l’armée du 2 avril 1918 : « Officier d’une bravoure et d’une énergie exemplaire au cours des derniers combats, a par la manoeuvre des ses sections de mitrailleurs en emploi et une conduite au feu des plus judicieuse retardé la progression de l’ennemi et brisé son élan en lui infligeant des pertes sérieuse. Grièvement blessé a refusé de se faire évacuer. Une blessure antérieure, 2 citations ». Il est ensuite nommé chevalier de la Légion d’honneur en date du 12 juin. Mais le 5 août 1918 dans le secteur de Fère-en-Tardenois, la chance ne lui sourit plus. Au moment de passer la Vesle avec son bataillon, près du Mont-Notre-Dame, il est blessé à la cuisse et avant que les brancardiers n’arrivent, un obus éclate et achève le blessé. Ainsi meurt le capitaine Raymond Janicot, chevalier de la Légion d’honneur, croix de guerre avec palmes et étoile de vermeil. Le 28 août 1918, un service funèbre est célébré dans la collégiale de Saint-Junien en présence d’une foule nombreuse, des parents et des 3 frères de Raymond, le capitaine Maurice Janicot, le lieutenant Alphonse Janicot et l’aspirant Lucien Janicot. C’est en 1921 que commencent les rapatriements des corps des combattants inhumés dans les différentes zones de combat. Le corps de Raymond Janicot arrive en gare des Bénédictins à Limoges le 17 juin 1921 et est inhumé deux jours plus tard dans le cimetière de Saint-Junien.Jean-Claude Frolich> De gAuCHe à DRoite : Raymond Janicot, le capitaine Chausson, Louis Dussoubz, le lieutenant de Simonnin, Maurice Janicot, le médecin auxiliaire Morlot.

N°59Le chercheur d’Or • N° 59 • septembre 2015 3la foudre est tombéesur le clocher de l’égliseBien avant l’invention du paratonnerre par Benjamin Franklin en 1752, on avait trouvé le moyen de se protéger plus ou moins (plutôt moins) de la foudre.DaNs la France entière, la seule solution connue à cette époque pour combattre la foudre était de sonner les cloches. On disait que le son des cloches détournait les orages. Alors, lorsque les nuages sombres s’approchaient, que l’orage et la tempête menaçaient, on commençait par ce que l’on appelait « le carillon du tonnerre ». En fait, des hommes montaient dans le clocher pour sonner à toute volée. Les paroissiens se mobilisaient, les uns se réunissaient dans l’église pour dire des litanies, d’autres plus nombreux sortaient dans les rues avec des bassines et des marmites et les frappaient avec un objet en métal. Il en résultait un beau tintamarre terrestre pour éloigner celui du ciel. Au XVIIIe siècle, une dizaine de carillonneurs par an se faisait griller par la foudre dans leur clocher. Devant ces morts et le peu d’efficacité de ce rite, on interdit donc « le carillon du tonnerre »à la fin de l’Ancien Régime, mais sa pratique continua encore longtemps. Il est dit qu’en 1956, dans le sud-ouest, plus de 150 paroisses continuaient toujours à sonner les cloches. Cette pratique n’a pas fait exception à Saint-Junien, comme nous le montre l’entrefilet ci-après datée du 21 septembre 1779 : « On écrit de Limoges que le tonnerre tomba le 2 de ce mois, sur le clocher de l’église collégiale de Saint-Junien, qu’il en a enlevé les tuiles, dont la chute a endommagé les maisons voisines ; qu’il a fondu l’anneau auquel était attaché le marteau du timbre de l’horloge; qu’un jeune homme qui sonnait pour détourner l’orage, suivant l’ancienne et dangereuse coutume de la plupart des villes et villages de cette province, a été frappé à mort ; que la foudre traversa le tambour du choeur et la nef de l’église, et s’échappa par une fenêtre, dont elle a fait tomber quelques vitres, est allée frapper un homme qui, après avoir longtemps sonné, se reposait devant la porte d’entrée ; que le sacristain et son valet, alors sous le clocher, ont été renversés ; que le premier est mort, après 33 heures des mêmes secours qui ont conservé la vie du second ; que ce feu céleste a tout-à-coup paru s’abîmer dans un trou d’environ un pied de profondeur sur huit pouces de diamètre qu’il a formé à côté de la fontaine publique, dont le cours a été arrêté pendant 24 heures, et est encore très diminué depuis ce moment. » Et encore bien avant cette histoire, nous trouvons dans la Chronique de Comodoliac, le témoignage de cette pratique.« Ce prévôt (Pierre II, 15e prévôt de Saint-Junien) eut encore à son actif, que l’année 1264 du Seigneur, une grande cloche fut placée dans l’église de Saint-Junien. Elle fut baptisée sous le nom d’André, pour qu’on la sonne dans les grandes fêtes de l’église, les anniversaires des personnages importants et aussi leurs enterrements, et chaque fois que se manifesterait la crainte d’une tempête. » Jean-René Pascaud extrait du « processionnal de limoges » de 1760> Façade de la collégiale de Saint-Junien, dessin de A. Fage, paru dans René Fage, L’église de Saint-Junien (Haute-Vienne), Caen, 1906. TraducTionLibère-nous, Seigneur, de la foudre et de la tempête. Ordonne, Seigneur Dieu et donne le calme. Prions Que de ta maison soient éloignés les dérèglements des vents, nous t’en prions, Seigneur, et que s’écarte la malignité des tempêtes du ciel, par le Christ.

le supplément « le Chercheur d’Or » est consultable en ligne à l’adresse : http://gantier.jimdo.com/la version papier est disponible gratuitement aux archives municipales, à la médiathèque de saint-Junien et à l’office du tourisme.pour tout renseignement : 05 55 02 30 69 – Courriel : socvp@orange.frEDITIONS L’ABEILLE B.I.P. SASDépôt légal à parution • ISSN 3441-4101 K • ARRONDISSEMENT DE ROCHECHOUART. Autorisé pour l’arrondissement judiciaire à publier les annonces judiciaires et légales en matière de procédure civile et de commerce, ainsi que les actes des sociétés. No CPPAP 0615 I 87943 Tirage : 4.000 ex. Abonnement 2015 : 45  • Prix du No 1 Directeur de publication : François BUSSAC • rédactrice en chef : Anne CHATENET • rédactrice : Louise CARPENTIER • rédaction « le Chercheur d’Or » : Franck Bernard et Société des Vieilles Pierres.Conception : Le Petit Dauphin. Impression : ROTO Centre • 45770 SARAN/Graphicolor • 87000 LIMOGES.encore des sceaux…Les deux précédents Chercheur d’Or ont évoqué les sceaux anciens et modernes de la ville de Saint-Junien. Il reste à présenter ceux d’une administration issue de la Révolution, qui eut son chef-lieu dans notre cité. Il s’agit d’un des districts de la Haute-Vienne, celui de Saint-Junien, qui regroupait six nouveaux cantons : Oradour-sur-Vayres, Rochechouart, Saint-Junien, Saint-Laurent-sur-Gorre, Saint-Mathieu et Saint-Victurnien. L’opposition de Rochechouart à ce découpage qui lui enlevait le chef-lieu espéré fut vive, mais inutile.A l’issue d’élections en août 1790, la présidence échoit à un médecin, Jean-Baptiste Simon de Beaujeu, et le secrétariat à un avocat, Pierre-Léonard Périgord fils, tous deux de Saint-Junien. Léon Colomb a rappelé la mise en place du district dans l’ouvrage de la Société Etienne-Maleu, Saint-Junien, Junien la Montagne, [1989], p.11-33. Entre le Directoire du département et les communes, les tâches du district ne sont pas toujours faciles, comme le montrent les délibérations. A l’aide du registre conservé aux Archives départementales, le docteur Marquet en a détaillé les travaux dans un bulletin des Amis des sciences et des arts de Rochechouart (tome XIX, n°1, 1910, p.3-21). Confronté à des difficultés monétaires, le district de Saint-Junien a émis en 1792 des billets de confiance, signalés par Jean-René Pascaud dans Le Chercheur d’Or, n°10, du 27 février 2003. Pour timbrer ses actes, le district utilise des sceaux que l’on connaît en trois versions successives, empreintes de cire plaquées sur le support : • 1791 : ovale de 27 mm x 23 ; entre deux rameaux, écusson à fleurs de lys surmonté d’une pique avec bonnet phrygien ; devise : La Loi et le Roi ; légende : DISTRICT DE ST-JUNIEN (voir illustration). • 1793 : ovale de 30 mm x 26 ; la République, la main gauche sur un faisceau de licteur tient dans la main droite une pique surmontée d’un bonnet ; légende : DISTRICT DE ST-JUNIEN REPUBLIQUE FRANÇOISE (voir illustration).• 1792 : ovale de 27 mm x 24 ; entre deux branches de chêne, arbre surmonté d’un bonnet phrygien ; devise : Liberté Egalité ; légende : DISTRICT DE ST-JUNIEN. Ce sceau illustre la couverture de Saint-Junien, Junien la Montagne. LA Constitution de l’an III (1795) supprime les districts, et celle de l’an VIII (1799) crée les arrondissements et les sous-préfectures. Cette fois-ci, Rochechouart prenant sa revanche sur Saint-Junien en obtient le chef-lieu. Mais le premier sous-préfet sera un Saint-Juniaud, Pierre Léonard Périgord (1761–1836). On l’a vu secrétaire du district en 1790, il en est procureur-syndic en 1793. Son épouse, Thérèse Chavaud, appartient à la Société populaire des Amies de la République. Elle y est considérée comme « chef des tricoteuses et des adorateurs de Marat ». A la disparition du district de Saint-Junien, Pierre-Léonard Périgord devient commissaire du Directoire exécutif près l’administration départementale. Il le reste jusqu’en juin 1799, étant nommé sous-préfet de Rochechouart le 3 floréal an VIII (23 avril 1800). Il conserve ce poste sous l’Empire, remplacé en août 1814 par le comte de Lestrade. Pierre-Léonard Périgord se retire alors à Saint-Junien. Il y avait acheté l’ancienne abbaye Saint-Amand, où ses descendants se maintiendront dans la famille Pantet-Depland